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Le paiement à  la performance des pharmaciens divise les médecins

à€ compter du 1er janvier 2013, les officines disposeront d'un forfait annuel de 40 euros par patient pour le suivi des patients sous AVK. Si les pharmaciens se félicitent du dispositif adopté dans leur nouvelle convention, de nombreux syndicats de médecins l'estiment trop avantageuse. La CSMF se montre en revanche favorable à  ce type de coopération et juge « inappropriée » la polémique.

LA NOUVELLE CONVENTION pharmaceutique, signée le 4 avril dernier par l'assurance-maladie et trois syndicats (FSPF, l'USPO et l'UNPF), met en musique les nouvelles missions du pharmacien prévues par la loi Hôpital, Patients, Santé et Territoires (HPST). Une disposition a particulièrement retenu l'attention du corps médical : le suivi spécifique des patients sous anti coagulants, qui doit entrer en vigueur au 1er janvier 2013.

La convention prévoit en effet dans le cadre du paiement à  la performance (P4P) le versement par l'assurance-maladie aux officinaux d'un forfait de 40 euros par patient sous AVK et par an. En contrepartie, les officinaux s'engagent à  réaliser avec le patient un entretien à  l'initiation du traitement et au moins deux autres dans la même année, dans un espace de confidentialité. Le corps médical s'est ému de cette disposition, dénonçant une violation de son pré carré.

MG France a signifié sa « stupéfaction » : « L'assurance-maladie estime que la surveillance par le pharmacien d'une seule ligne de prescription vaut autant que la prise en charge globale d'un patient en ALD par le médecin traitant ». Même tonalité au Syndicat national des spécialistes des maladies du coeur et des vaisseaux (SNSMCV), qui rappelle que cette surveillance est déjà  assurée gracieusement par les généralistes et les cardiologues, et qu'elle ne peut s'envisager « sans la connaissance précise de l'indication, des pathologies associées et de la cible thérapeutique ». Quant à  Jean-Paul Hamon, président de la FMF, il ne veut pas non plus de cette surveillance des AVK par les pharmaciens : « C'est risqué et ce n'est pas leur métier, assure-t-il. Allons-nous commercialiser, de notre côté, des médicaments"‰? »

L'USPO surprise par les réactions de médecins

Chez les pharmaciens, Gilles Bonnefond, patron de l'Union syndicale des pharmaciens d'officine (USPO ) prend la défense du dispositif. « Je n'ai pas compris la réaction des médecins, confie-t-il au « Quotidien », car parmi le million de patients sous AVK, 17"‰000 sont hospitalisés chaque année pour mésusage ou iatrogénie ». Le patron de l'USPO rappelle que ce suivi ne peut se faire que dans le cadre d'un protocole établi par le médecin traitant, le pharmacien et le patient. Dans la pratique, précise encore Gilles Bonnefond, ce suivi va nécessiter la rédaction d'un avenant à  la convention (qui devra être signé au plus tard le 1er janvier 2013), qui déterminera le cadre du protocole et les conditions dans lesquelles se dérouleront les entretiens pharmacien-patient. Mais sans attendre la signature de cet avenant, Gilles Bonnefond imagine que les entretiens devront permettre au pharmacien de s'assurer que le patient a compris l'enjeu de son traitement et qu'il a réalisé les examens biologiques nécessaires. Le pharmacien devra également interroger le patient sur son régime alimentaire, s'assurer de l'observance du traitement, et vérifier que d'autres médicaments prescrits par ailleurs ne présentent pas un risque iatrogène.

Quant à  la rémunération, elle ira dans les comptes de la pharmacie et non dans la poche du pharmacien. Sur les 40 euros, rappelle encore Gilles Bonnefond, l'officine devra rétrocéder la TVA, et payer des charges sociales et de retraite. Pas de quoi fouetter un chat selon lui, d'autant que personne n'est aujourd'hui en mesure de chiffrer le nombre de patients qui s'inscriront dans cette démarche. « Travaillons ensemble et cessons de nous chamailler », conclut-il.

600 000 patients concernés selon la CNAM

Message reçu cinq sur cinq par Michel Chassang, président de la CSMF et du Centre national des professions libérales de santé (CNPS). « Les médecins qui s'opposent à  cette mesure n'ont pas pris le temps de lire la convention pharmaceutique, regrette-t-il, et ils n'ont pas vu que cette mesure suppose l'accord du médecin de chaque patient et que le suivi fera l'objet d'un protocole signé avec le pharmacien ». Le Dr Chassang juge donc cette polémique « inappropriée », d'autant que selon lui, les médecins sont déjà  « submergés » par le suivi de patients sous AVK. Tout au plus concède-t-il que la somme de 40 euros prévue par la convention « a une valeur symbolique » (c'est la somme que touchent les médecins pour le suivi de leurs patients en ALD), et que l'assurance-maladie aurait pu fixer un autre montant. Mais pour le reste, Michel Chassang n'en démord pas, il est résolument « favorable à  ce type de coopération ». Philippe Gaertner, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), met un bémol à  cette analyse en indiquant que l'accord du médecin n'est pas indispensable à  la mise en route de ce suivi, même si dans la pratique, le praticien doit être associé à  la rédaction du protocole.

Le rôle de chaque professionnel dans le dispositif sera tout l'enjeu du futur avenant conventionnel

Selon l'assurance-maladie, un million de patients sont aujourd'hui sous AVK mais d'après ses projections, seulement 600 000 d'entre eux devraient entrer dans le cadre de cet accompagnement. Le montant de l'enveloppe nécessaire au financement de la mesure pourrait donc s'élever à  environ 24 millions d'euros par an.

"º HENRI DE SAINT ROMAN

Le Quotidien du Médecin 18/04/2012



      Date de rédaction : 18 avril 2012 8 h 51

      Date de modification : 18 avril 2012 8 h 51 min

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