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La télémédecine en ORL en 2025 par Nils MOREL

 

 

Nils Morel, Président du SNORL a voulu résumer ici les règlementations concernant la télémédecine, en éludant les situations qui ne concernent pas les ORL.

Les textes de référence sont le journal officiel : Arrêté du 20 juin 2024 portant approbation de la convention nationale organisant les rapports entre les médecins libéraux et l’assurance maladie et le rapport de la HAS du 29 février 2024 : Lieux et conditions d’environnement pour la réalisation d’une téléconsultation ou d’un télésoin.

Téléconsultations en ORL :

La téléconsultation est apparue officiellement en France en 2019 ; les ORL l’ont réellement découverte pendant la pandémie de Covid 19. Ils ont découvert cette nouvelle façon de consulter et s’adaptent à une nouvelle sémiologie.

Elle est cotée Tcs à la NGAP, valorisée 30€ ; selon son secteur d’activité l’ORL peut facturer un dépassement d’honoraires.

La Tcs est un outil pour favoriser l’accès aux soins et peut réduire les déplacements des patients. C’est une activité qui se doit de respecter les limites médicales, la règlementation et un certain bon sens.

Les patients doivent être informés des conditions de réalisation et avoir donné leur accord pour ce type d’échange.

Les Tcs ne peuvent représenter au maximum que 20% de l’activité (en volume) du médecin, y compris s’il s’agit d’une activité salariée via une plateforme. A ce propos tout contrat professionnel de médecin est contrôlé par le Conseil de l’Ordre des médecins, généralement au niveau départemental, la consigne actuelle donnée aux CDOM est de faire contrôler ces contrats au niveau national.

Une Tcs doit respecter de façon cumulative les principes de parcours de soins, d’alternance de soins en présentiel et à distance et de territorialité. Quelques exceptions cependant :

  • Exceptions au parcours de soin (adressage par le médecin traitant du patient, puisque l’ORL ne fait pas partie des spécialités à accès direct) ; dans ces cas la Tcs doit être organisée dans un cadre territorial (CPTS, MSP, ESS ; plateforme territoriale de Tcs référencée par la commission paritaire locale) :
    • Patients âgés de moins de 16 ans
    • Patients sans médecin traitant ou di celui-ci n’est pas disponible dans un délai raisonnable en fonction de l’urgence du problème de santé
    • Situations d’urgence (telles que définies dans le code de la sécurité sociale)
    • Patients écroués
    • Patients résidant en établissements pour personnes âgées dépendantes ou établissements accueillant ou accompagnant des personnes adultes handicapées
  • Exception au principe d’alternance : un seul cas, si la Tcs est organisée via le Service d’Accès aux Soins (SAS), pour répondre à une demande ponctuelle de soin non programmé
  • Exceptions au principe de territorialité
    • Soit trois conditions cumulatives
      • Patients résidant dans les zones d’intervention prioritaires
      • En l’absence d’organisation territoriale de télémédecine
      • Pour les téléconsultations de médecine générale pour les patients qui n’ont pas de médecin traitant
    • Soit patients orientés par le SAS en cas d’impossibilité d’accès à une consultation physique

Il apparait à ce stade qu’en ORL l’activité de téléconsultation de patients non connus se fait en principe à la demande du médecin traitant, pour des patients situés dans le territoire de l’ORL consultant qui devra veiller à une alternance de téléconsultations et de consultations physiques. Elle sera de plus limitée pour des raisons médicales (palpation, examens orificiels…).

Concrètement l’activité de téléconsultation ORL va concerner très majoritairement des patients connus, pour des suivis de cicatrisations, de vertiges, de sinusites chroniques, de pathologies du sommeil, pour interpréter des résultats d’examens, … Dans ce respect des règles la Tcs peut rendre de réels services aux patients, en limitant leurs déplacements.

Comme lors de toute consultation la Tcs fait l’objet d’un compte rendu écrit dans le dossier médical et dans le parcours de soins d’un courrier de retour au médecin traitant.

Il n’est pas possible de coter APC ni d’acte technique en Tcs.

Un arrêt de travail peut être prescrit lors d’une téléconsultation. Le médecin précise qu’il s’agit d’une prescription en téléconsultation directement sur l’avis d’arrêt de travail en ligne.

La durée de l’arrêt prescrit à distance ne doit pas dépasser 3 jours. Au-delà, les arrêts de travail et les prolongations d’arrêt prescrits en téléconsultation ne sont pas indemnisés. Si un patient a besoin d’un repos plus long, soit dès l’arrêt initial, soit parce que sa maladie se prolonge, il nécessite un examen physique qui doit se faire en présentiel.

Une prescription de médicament ou de dispositif médical est possible.

 

Téléexpertises en ORL :

La téléexpertise (TE) est un échange asynchrone entre un professionnel de santé requérant et l’ORL.

Le patient doit en être informé et avoir donné son accord, l’échange doit être sécurisé (outils numériques certifiés) et l’ORL doit donner réponse dans un délai de 7 jours. L’ORL n’a aucune obligation de réponse à une demande de TE. Elle doit faire l’objet d’un compte rendu par le médecin requis, inscrit au dossier patient et qui doit être transmis au médecin traitant et au professionnel de santé requérant ayant sollicité l’acte

La TE concerne les échanges entre requérant qui peut être un médecin (y compris ORL), un orthophoniste, une sage-femme, un infirmier, un IPA, un masseur-kinésithérapeute, un pédicure-podologue et un ORL requis.

La NGAP prévoit une rémunération de 10€ pour le requérant et de 20€ actuellement (23€ à partir du 1er janvier 2026) pour le requis, code TE2. La TE n’est pas facturée au patient concerné. Elle fait l’objet d’une facturation directement entre l’assurance maladie. Aucun dépassement d’honoraire n’est possible.

La TE est prise en charge pour tous les patients et toutes les situations médicales sont susceptibles d’être concernées par la téléexpertise. La pertinence du recours à la TE est appréciée par le professionnel de santé requérant.

A ce jour, il n’est pas possible de prescrire un arrêt de travail, un médicament ou un dispositif médical à l’issue d’une TE.

 

Primo-prescription de prothèses auditives et télémédecine

Les possibilités de la télémédecine en ORL sont larges pourtant la quasi-totalité de la communication concerne la primo-prescription de prothèses auditives, tout particulièrement pour les patients presbyacousiques « simples ».

Avant 2018, il n’existait pas de cadre légal et tout médecin pouvait prescrire des prothèses auditives, sans obligation d’avoir réalisé l’examen audiométrique auparavant (!). Depuis 2018, la primo-prescription est réservée aux ORL et aux médecins généralistes dûment formés avec l’apparition de la notion de prescripteur testeur qui doit avoir interrogé le patient, examiné l’oreille et le tympan et doit avoir réalisé une audiométrie tonale (aérienne et osseuse) et vocale dans le silence.

La CPAM et certaines mutuelles ont constaté que des ordonnances d’appareils auditifs avaient été rédigées sans respecter l’ensemble des principes listés ci-dessus et peuvent procéder à des enquêtes rétrospectives.

Pour un patient adressé par le médecin traitant, habitant relativement proche de l’ORL, qui pourrait donc l’examiner au besoin il existe une possibilité, avec les audiomètres pilotables à distance, de réaliser une téléconsultation avec interrogatoire, examen otoscopique et audiométrie, permettant donc la primo-prescription d’une prothèse auditive. Attention cependant à encore quelques articles :

Code de la santé publique: article R. 4127-19 : «  La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce. Sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale. »

Code de la santé publique : article R. 4127-23 : «Tout compérage entre médecins, entre médecins et pharmaciens, auxiliaires médicaux ou toutes autres personnes physiques ou morales est interdit.»

Code de la santé publique: article R. 4127-25 : «  Il est interdit aux médecins de dispenser des consultations, prescriptions ou avis médicaux dans des locaux commerciaux ou dans tout autre lieu où sont mis en vente des médicaments, produits ou appareils qu'ils prescrivent ou qu'ils utilisent.»

Cependant d’après le Conseil National de l’Ordre des Médecins: article R. 4127-23 et 25 CSP « Le principe de la réalisation par le médecin de téléconsultation proposées à des patients installés dans les locaux commerciaux de professionnels de santé ne constituait pas en lui-même une atteinte à la déontologie sous réserve d’un certain nombre de conditions».

Nous connaissons tous la démographie des ORL ; les nombreux départs à la retraite de ces dernières années n’ont pas encore été remplacés par de nouveaux diplômés et des patients peuvent attendre quelques mois une consultation ORL ou être contraints à de longs déplacements. Lorsque certains critères sont réunis (patients âgés de plus de 60 ans habitant en zone déficitaire en ORL, dont le médecin traitant a réalisé l’anamnèse et une otoscopie considérée normale et a demandé un avis ORL) des parcours spécifiques de soins sont envisageables, employant les outils de télémédecine. C’est pour cela que le CNP a déposé des demandes de dérogations (articles 51). Les dossiers sont en cours d’examen par les autorités. En attendant ces dérogations il est risqué sur un plan légal de ne pas respecter les règles rappelées dans ce texte.

Nils MOREL, Président du SNORL

Le 31 mars 2025

 

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