Cher(e)s Ami(e)s
Vous avez sans doute suivi l’actualité politique et la présentation du projet de Loi N°682 par le député Guillaume Garot, supportée par plus de 250 parlementaires issus de 9 groupes parlementaires de droite, de gauche et du centre.
Ce projet de loi initiale prévoit : la fin de la liberté d’installation, la fin du secteur II pour les nouveaux installés, la facilité d’exercice pour les PADHUE (Praticiens à Diplôme Hors Union Européenne), la création d’une quatrième année d’internat de médecine générale avec stage obligatoire en région sous-dotée, le soutien aux centres de santé avec des médecins salariés avec développement du financement à la capitation, l’obligation de participation à la Permanence De Soins, enfin la mise en place pour les salariés de la possibilité d’auto-déclarer un arrêt de travail ou un congés pour enfant malade.
Le Conseil National de l’Ordre des Médecins par la voix de son président François Arnault soutient ce mouvement porté par l’ensemble des syndicats médicaux libéraux et hospitaliers :
"Nous devons à l’obstination déraisonnable d’un député le vote d’une loi de coercition enlevant la liberté d’installation aux médecins. ...Quel coup de maître, monsieur le député !…. Votre combat contre la médecine de territoire est une faute. Cette médecine doit au contraire être soutenue, respectée, encouragée et remerciée. Cette médecine, élément central des équipes de soins coordonnées, représente le maillon indispensable dans la chaîne du soin qui régule les patients et permet que les médecins hospitaliers, également en grande difficulté, ne soient pas submergés.
Après avoir imaginé que les professions paramédicales pouvaient remplacer les médecins auprès des patients, faisant fi de notre formation longue et difficile nous donnant notre compétence incontournable, monsieur le député, vous ne devriez pas crier victoire mais plutôt être auprès des médecins qui, à longueur de journée, accompagnent la population et lui apportent les soins nécessaires.
Continuons à nous battre, à défendre la médecine faite par des médecins au seul bénéfice de la qualité des soins que nous devons aux patients."
Le lien vers le texte initial :
https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/17/textes/l17b0682_proposition-loi#
Ce projet de loi comporte 17 articles détaillés ci-dessous pour "mieux répartir, mieux former, mieux accompagner ceux qui nous soignent au quotidien."
L’article 1er permet de flécher l’installation des médecins – généralistes et spécialistes – vers les zones où l’offre de soins est insuffisante.
Il crée une autorisation d’installation des médecins, délivrée par l’ARS. En zone sous‑dotée, l’autorisation est délivrée de droit pour toute nouvelle installation. Dans tous les autres cas, c’est‑à‑dire lorsque l’offre de soins est au moins suffisante, l’autorisation est délivrée uniquement si l’installation fait suite à la cessation d’activité d’un praticien pratiquant la même spécialité sur ce territoire. L’autorisation d’installation intervient après consultation, par l’ARS, de l’Ordre départemental des médecins.
L’article 2 propose de créer un indicateur territorial de l’offre de Soins (ITOS), élaboré conjointement par les services de l’État en lien avec les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) qui dresse une cartographie précise, par bassin de vie, de la répartition de l’offre de soins sur le territoire français. Cet indicateur définit également, dans les zones les plus sous‑dotées, un niveau minimal d’offre de soins à atteindre pour chaque spécialité médicale.
La seconde partie de l’article 2 précise que le directeur général de l’agence régionale de santé doit s’appuyer sur l’indicateur territorial de l’offre de soins afin de déterminer annuellement les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins ainsi que les zones dans lesquelles le niveau de l’offre de soins est particulièrement élevé.
L’article 3 vise à favoriser l’installation durable des médecins sur le territoire en limitant la durée cumulée des remplacements en libéral dans la carrière d’un praticien. L’Ordre national des médecins estime qu’entre 2010 et 2023, le nombre de médecins dits « en intermittence » a augmenté de 64,4 % tandis que le nombre de médecins en activité régulière a diminué de 1,3 %. Ces médecins remplaçants permettent d’assurer la continuité des soins dans de nombreux territoires. Néanmoins, il ne s’agit pas d’une solution pérenne pour garantir une offre de soins suffisante sur le long terme. Il reste ainsi préférable d’inciter les médecins à exercer de façon permanente, en particulier dans les zones sous‑dotées.
« Un médecin ne peut cumuler plus de quatre années d’exercice au titre de remplaçant à titre libéral. La durée des remplacements à titre libéral effectués en application des septième et avant‑dernier alinéas du présent article n’est pas prise en compte pour le calcul de cette durée d’exercice. »
L’article 4 supprime la majoration des tarifs à l’encontre des patients non pourvus d’un médecin traitant.
L’article 5 facilite l’exercice des praticiens à diplôme hors Union européenne (PADHUE). Il s’agit d’accorder une reconnaissance nouvelle à ces médecins qui œuvrent quotidiennement dans les établissements de santé les plus isolés du territoire sans compter leurs heures. Il permet au directeur général de l’agence régionale de santé d’autoriser par arrêté un médecin ressortissant d’un pays hors Union européenne à exercer, notamment dans les zones caractérisées par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins. Le recrutement de praticiens formés en dehors du territoire national est indispensable afin d’augmenter le nombre de médecins exerçant en France. Actuellement, il est très restreint, alors même que certains PADHUE sont totalement francophones et ont fait leurs études dans des facultés de médecine très bien classées au niveau international. Aujourd’hui, plusieurs milliers de médecins étrangers diplômés hors de l’UE suivent un parcours de validation des acquis de l’expérience en France, et une part importante d’entre eux ont d’ores et déjà les compétences pour exercer la médecine de plein droit. Cette première partie de l’article est inspirée du dispositif mis en place pour les départements de la Guyane, de la Guadeloupe, de la Martinique et de Mayotte, où les agences régionales de Santé peuvent autoriser par arrêté le recrutement de médecins ressortissants de pays hors Union européenne.
La seconde partie de l’article vise à gérer le « stock » des PADHUE présents en France et y travaillant depuis de nombreuses années. Il propose la création d’épreuves de vérification des connaissances (EVC) spécifiques et sans limitation du nombre d’admis au bénéfice des PADHUE pouvant justifier de deux ans d’exercice rémunéré en France, et sans limite quant au nombre de fois où ces derniers peuvent passer lesdites épreuves.
L’article 6 organise l’extinction progressive du secteur 2 « hors‑OPTAM ». Depuis quelques années, une inflation des tarifs de consultations de médecine générale ou de spécialité est observée. Elle est rendue possible par la pratique des dépassements d’honoraires sans plafonnement pour les médecins conventionnés en secteur 2 « hors‑OPTAM ». Cette pratique s’est renforcée chez les médecins nouvellement installés. Dans les faits, selon une étude récente de l’association de consommateurs UFC‑que‑Choisir, les honoraires peuvent varier du simple au double selon les départements. Les médecins en secteur 2 « hors‑OPTAM » se concentrent particulièrement dans les secteurs où la démographie médicale est relativement moins défavorable. Cette disposition renforce alors l’inégalité territoriale d’accès aux soins. Cet effet d’aubaine accroît également le renoncement financier aux soins chez les publics les plus précaires et participe alors à une médecine à deux vitesses. Afin d’encourager une meilleure répartition de la cartographie des soins sur le territoire dans un contexte de désertification médicale, l’article 6 propose de mettre en place l’extinction progressive de la pratique d’honoraires de secteur 2 « hors‑OPTAM » en l’interdisant pour toute nouvelle installation.
L’article 7 assure une formation a minima de première année comme en études de médecine, de pharmacie, d’odontologie et de maïeutique dans chaque département. Dans cette même optique de meilleure répartition de l’offre de formation en médecine sur l’ensemble du territoire, la seconde partie de l’article 7 impose la présence d’au moins un CHU par région administrative, ce qui entraîne la création d’un CHU en Corse d’ici 2030.
L’article 8 crée un indicateur pluriannuel des besoins (IPaB). L’indicateur joue un rôle similaire à l’ITOS dans le cadre des formations en santé, et permet d’adapter les capacités de formation et le nombre d’admis tout au long du cursus – en lien avec les nouvelles dispositions législatives qui actent la priorisation des besoins de santé dans la fixation du nombre d’étudiants en deuxième année de médecine.
L’article 9 vise à créer une année préparatoire aux études de médecine. Cette formation, accessible aux étudiants immédiatement après l’obtention de leur baccalauréat, permettra une remise à niveau en vue de l’entrée en parcours d’accès spécifique santé et du passage du concours d’accès à la deuxième année d’études de médecine. Elle viserait en priorité des territoires possédant un taux d’accès aux études de médecine particulièrement faible et caractérisés par une offre de soins insuffisante.
L’article 10 supprime la procédure Parcoursup pour l’entrée en institution de formation en soins infirmiers (IFSI), et rétablit donc un concours d’entrée. Depuis l’entrée en vigueur de Parcoursup, le taux d’abandon en cours de cursus d’infirmier a augmenté, atteignant jusqu’à 20 % en 2022 ; cette tendance conduit à une baisse du nombre d’infirmiers diplômés chaque année, alors même que le nombre de places en institut est en hausse.
L’article 11 augmente le nombre de CESP offerts dès la deuxième année du premier cycle d’études de médecine, en fixant un seuil minimal à 25 % des étudiants au sein d’un même établissement d’enseignement supérieur. (Contrat d’Engagement de Service Public avec une allocation mensuelle) L’objectif de cette mesure, qui vient en complément de l’article 7 en ce qu’elle permet un accès plus démocratique aux formations en santé, est une véritable filière du service public médical dès les premières années d’études, mais surtout la possibilité pour tous les jeunes, quelle que soit leur origine sociale, d’avoir l’opportunité d’exercer en libéral.
L’article 12 vise à rendre véritablement opérationnelles les dispositions de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 créant une quatrième année de médecine générale comportant un stage à réaliser « en priorité » en zone sous‑dense. Le I organise la structuration, par l’État, d’une offre de stage suffisante dans ces territoires, notamment à travers la massification et la simplification de l’accès à la maîtrise de stage pour les praticiens diplômés. Ce renforcement de l’offre permet de rendre, à compter du 1er janvier 2027, le stage en zone sous‑dense systématique et obligatoire pour l’ensemble des étudiants de 4e année de médecine générale.
L’article 13 vise à favoriser le développement du salariat dans les centres de santé au sein des zones sous‑dotées. L’article propose de garantir l’ouverture et le financement de postes salariés en centres de santé par les Agences régionales de santé dans les territoires où l’accès aux soins est particulièrement dégradé en raison, notamment, d’une carence d’offre libérale. Le présent article assure également la viabilité économique des centres de santé. D’une part, il rehausse le montant de la subvention Teulade de 11,5 % à 13,5 % pour les centres de santé pluridisciplinaires qui emploient au moins un médecin généraliste. D’autre part, il ouvre la possibilité aux centres de santé signataires de l’accord national avec l’Assurance maladie et volontaires de mettre en place une rémunération forfaitaire au patient (capitation) pour les activités de soins. Enfin il permet d’améliorer la coordination des centres de santé avec l’ensemble des acteurs de santé du territoire en systématisant leur participation aux CPTS.
L’article 14 rétablit l’obligation de permanence des soins. Rétablir une permanence des soins pour tous les médecins en activité, c’est partager et diminuer la charge de travail de chacun d’entre eux.
L’article 15 vise à encadrer le phénomène de concentration de l’offre de soins observé depuis plusieurs années dans différents secteurs. La première partie de l’article est une disposition à portée générale, qui inclut dans les objectifs des conventions signées entre les professionnels de santé et l’Assurance maladie un objectif de préservation de l’indépendance d’exercice desdits professionnels. La seconde partie de l’article permet plus concrètement de préserver une offre de soins à la fois indépendante et correctement répartie sur le territoire, en faisant définir par l’État une liste minimale d’actes devant être réalisés sur place par les laboratoires de biologie, sans possibilité de transmission à un laboratoire tiers risquant d’être situé à une grande distance.
L’article 16 vise à économiser du temps médical au bénéfice des médecins. La première partie donne la possibilité pour les salariés d’auto‑déclarer un arrêt maladie de courte durée, c’est‑à‑dire de trois jours consécutifs ou moins, dans la limite de trois fois par an. L’objectif de cette disposition vise à la fois à libérer du temps médical, et à garantir la possibilité de se mettre en arrêt maladie dans les territoires où l’accès aux soins – et donc aux consultations, est particulièrement dégradé, en laissant les patients se déclarer eux‑mêmes en arrêt maladie lorsque la durée de l’arrêt en question n’excède pas trois jours. La durée proposée du congé correspond par ailleurs à celle du délai de carence, durant laquelle le salarié n’est pas rémunéré en cas d’arrêt maladie. La seconde partie vise à ouvrir la possibilité au parent accompagnant un enfant malade ou victime d’un handicap ou d’un accident, d’auto‑déclarer un congé lorsque la durée prévisible d’un traitement destiné à son enfant est brève, soit 5 jours au maximum. Cette nouvelle disposition permet, d’une part, d’éviter aux parents accompagnants la charge d’une prise de rendez‑vous, en particulier dans les territoires où l’accès aux soins est dégradé, et d’autre part de libérer du temps médical pour les professionnels de santé lorsque le traitement ne justifie pas de consultation supplémentaire. En réduisant le nombre de consultations préalables à une mise en arrêt ou en congé, l’article 16 permet par ailleurs de diminuer directement les dépenses de l’Assurance maladie.
L’article 17 permet de gager financièrement la présente proposition de loi.
Cette proposition de Loi a été « allégée » par la commission des affaires sociales et il reste à débattre seulement 4 articles à partir du Lundi 5 Mai à l’Assemblée Nationale :
Article 1 : la régulation de l’installation des médecins
Article 2 : la suppression de la majoration des tarifs pour les patients dépourvus de médecin traitant
Article 3 : la première année d’études en Santé dans chaque département
Article 4 : le rétablissement de la permanence des soins
Mais il est probable que les autres articles reviennent en amendement.
C’est pourquoi l’ensemble des syndicats médicaux des plus jeunes (ANEMF, ISNIH, ISNAR, Réagir, Jeunes Médecins…) au plus anciens (MG, FMF, SML, CSMF, Le Bloc, UFML...) appellent à un arrêt d’activité TOTAL et ENTIER à partir du Lundi 28 Avril 2025 avec une manifestation Nationale à Paris le 29 Avril. Ce mouvement est soutenu par le CNOM et la plupart des CDOM.
Un fond est mis en place pour accueillir des dons pour soutenir financièrement les jeunes médecins. il est demandé à chaque médecin en activité d’y participer à hauteur du prix d’une consultation (30 €)
Le SNORL est vivement opposé à cette proposition de loi et nous considérons qu’elle est pénalisante, contreproductive et contribuerait à dégrader in fine l’offre de soins en médecine libérale, entrainant irrémédiablement une dégradation de l’offre de soins hospitalière.
Ainsi nous nous faisons le relai des différents syndicats horizontaux et syndicats d’internes et jeunes médecins.
Le lien pour participer à la cagnotte de solidarité :
Chacun est libre de ses opinions politiques, de soutenir la grève, manifester, participer au fond de solidarité. Il faut pouvoir prendre ses décisions en conscience, d’où l’objet de ce message informatif.
Bien amicalement à tous,
Dr Nils Morel | Président du SNORL
Date de rédaction : 23 avril 2025 11 h 22
Date de modification : 23 avril 2025 12 h 33 min